LA LIBERTÉ EN COURANT
Sylvie Delétang l’avoue : elle ne peut pas rester à la maison ! Alors, elle court. Et cela fait 26 ans que cela dure… Retour sur une passion tenace.
Ma première question est toute simple : après quoi courez-vous ?
« Je ne sais pas ! J'ai l'habitude de toujours me dépêcher, c'est peut-être pour ça que je cours ! Je me sens bien quand je suis en train de courir. Et puis, on a toujours envie de se prouver qu'on peut améliorer son chrono. C'est aussi ça le challenge. Quand les gens me demandent pourquoi je cours, je réponds souvent pour rattraper le temps perdu ! Mais ça ne sert à rien (rires) ! »
Et comment tout cela a-t-il commencé ?
« C'est un professeur qui a vu que j'avais de très bons résultats : à 16 ans, alors que j'étais cadette, je frôle le record départemental du 1.000 m. Et puis, je gagne les départementaux et les régionaux en UNSS, sans entraînement. Il y avait peut-être une voie à suivre… Mais le sport n'était vraiment pas dans la culture familiale. Je suis du milieu agricole. Il y avait d'autres priorités. On me faisait faire du sport mais autrement ! A 18 ans, je suis allée à l'ADC Loches, on n'était que deux filles et on ne faisait que de la route. Les résultats étaient bons mais je n'ambitionnais pas d'aller plus loin. »
Avec le recul, vous dites-vous que vous auriez pu avoir une autre carrière encore ?
« Si j'avais été prise en charge tôt, peut-être… Mais je ne me suis jamais focalisée là-dessus. J'aurais aimé faire un sport-études mais mes parents n'étaient pas pour. Maintenant, je me fais plaisir, je suis un peu reconnue, ça me va ! »
Après toutes ces années vous n'avez jamais senti la lassitude vous guetter ?
« C'est vrai que ça commence à faire ! Mais non, je ne me suis jamais lassée. Et ça me réussit bien tout compte fait ! Il y a toujours ce plaisir d'aller courir. Si je ne cours pas pendant une semaine, je suis comme un lion en cage ! C'est tellement bon de courir quand il fait froid et que tout le monde est au chaud dans sa cabane ou de voir, au printemps, la nature s'éveiller. C'est une évasion et pourtant, en même temps, des fois on se fait mal. Certaines séances, celles de vitesse, ne sont vraiment pas drôles. Mais c'est ce qui rend moins dures les courses. »
La course à pied, c'est aussi la liberté, non ?
« On part n'importe où, n'importe quand. Il n'y a pas de technique, pas de contraintes. Et puis, quand on court, on est bien. On évacue, cela permet de faire le vide. Quand je rentre du travail et que je vois qu'il y a plein de choses à faire à la maison, je me dis tant pis, cela attendra. Je prends mes baskets et je pars. Courir, c'est un peu une échappatoire, même si à un moment donné il faut bien résoudre les problèmes, faire ce qu'il y a à faire mais disons qu'en courant, on fait le tri là-haut. »
Les séances en groupe, autour d'une piste, on imagine que ce n'est pas votre dada…
« C'est sûr que je n'abîme pas la piste du club ! Mais il faut dire que je suis à une heure de route de Saint-Pierre. Et puis, j'ai toujours couru seule. J'aime la campagne, les champs. A l'inverse, en groupe, il y a une motivation qui se crée. Là, parfois, je me dis est-ce que je vais y arriver ? Mais on n'a rien sans rien. Alors, je suis les séances prévues par mon entraîneur. »
" La Jeannie Longo de la course à pied "
Et alors, le secret de votre longévité, quel est-il ?
« Je suis la bête à abattre (rires) ! Ou au moins la référence, je m'en rends bien compte ! Il y a deux ans par exemple, à l'arrivée de la Corrida de Chambray, j'ai surpris un gars dire à son copain : " Ah, je suis content, j'ai fini devant Delétang ". J'ai trouvé ça rigolo qu'il me prenne comme repère… C'est vrai que depuis dix ans, je me maintiens toujours autour du même temps sur 10 km. Après, si je dure, c'est peut-être que je n'ai jamais trop forcé. Au maximum, j'ai fait 5 séances par semaine mais jamais deux entraînements par jour. On m'a déjà dit que j'étais la Jeannie Longo de la course à pied (rires) ! Il me manque le palmarès quand même. Mais elle, elle a consacré sa vie à son sport. Moi, j'ai toujours privilégié la vie de famille. »
Justement, entre votre travail, votre famille, comment faites-vous pour trouver le temps de courir ? C'est un casse-tête pour bien des femmes…
« C'est l'organisation (rires) ! Quand je rentre du travail, je me change, je vais courir, je ne réfléchis pas. C'est comme ça, c'est réglé. Cela fait partie des choses quotidiennes à faire. Si je commence à regarder le journal, c'est cuit. Et je ne cours pas non plus tous les jours. Une heure par séance, ça se cale bien, ce n'est pas trop prenant sur la vie quotidienne. Je me dis que c'est aussi une heure de moins de passée devant la télé ! »
Votre fils fait du cyclisme, au niveau national, vous, vous êtes athlète, comment voyez-vous le rapport au dopage qui gangrène le sport ?
« J'ai déjà entendu que mon fils faisait un sport de dopés mais il y a beaucoup d'autres sports où le dopage existe mais de manière plus cachée… Le vélo est le sport le plus marqué au fer rouge. Le dopage, c'est pas anodin. Il y a des gens qui sont peut-être plus fragiles ; souvent, il y a toute une structure, y compris familiale, derrière. On en a eu des cas de dopage en course à pied aussi, au niveau local, mais c'est plus étouffé. C'est toujours dommage, surtout à notre niveau. Je me demande quelle image on a après de soi. Moi, je me dope au chocolat ! Je suis en plein dedans en ce moment ! »
Repères
> Née le 23 juillet 1969. > Vit à Descartes. Mère de deux enfants. > Travaille comme aide à domicile. > Court depuis l'âge de 16 ans. A débuté à l'ADC Loches. Est aujourd'hui licenciée à l'EA Joué/Saint-Pierre.
billet
Une exception
Jusqu'alors, cette page de l'Invité du mercredi était essentiellement consacrée à des personnalités qui ont fait le sport tourangeau, dans un passé proche ou lointain. Et puis, l'envie nous est venue de faire une exception pour Sylvie Delétang. Parce que la Descartoise le vaut bien, tout simplement. Pour sa gentillesse et sa simplicité. Pour son éternel sourire et son fair-play sans faille. Pour sa longévité remarquable.
Alors, même si elle reste une actrice bien active (voire hyperactive) du sport tourangeau, Sylvie Delétang méritait bien une petite entorse à la règle.
instantanés
28 MARS 2010, MARATHON DE L'ESPACE A KOUROU. « C'est Mustapha Berri qui m'avait fait la proposition de l'accompagner, lors des interrégionaux à Onzain. Ce fut une belle expérience : on part en pleine nuit, en ville et déjà il fait très chaud : autour de 32° et avec un taux d'humidité de 98 % à peu près. Moi qui n'aime pas la chaleur ! J'ai galéré, j'ai fini malade mais je n'ai pas marché ! J'ai fini 1re féminine et 6e au scratch et c'est Mustapha qui a gagné. Un beau souvenir. Le trophée était très sympa : une borne kilométrique en bois local, avec 42 d'écrit. »
10 MAI 2010, MATCH FRANCE - ALLEMAGNE A YUTZ. « En fait, les filles du club avaient insisté pour que je fasse le 5.000 m des championnats de France vétérans organisés en 2010 à Grandmont. J'y finis 2e, ce qui me vaut d'être retenue pour un match international en Lorraine. Cette sélection reste un grand souvenir, une fierté. J'ai toute la panoplie de l'équipe de France que je garde dans mon armoire précieusement : c'est mon petit plaisir. »
13 MAI 2012, MARATHON DU FUTUROSCOPE. « J'ai commencé à marcher au 32e kilomètre. Ça, ça n'est pas un bon souvenir… Je crois que les grandes courses, les longues courses, c'est fini pour moi. »
Retrouvez notre vidéo sur : www.lanouvellerepublique.fr/videos37
Chez les Delétang, le sport est une seconde nature. Madame court. Monsieur
« a fait du judo, du vélo, de la course à pied, du foot ». Et les enfants ont copié. Logique si l'on songe que « dès petits, ils ont suivi tous les week-ends » leurs parents.
Dans la famille Delétang, il y a donc Emmanuel qui a joué au foot et qui aujourd'hui pratique le motocross « en loisir, pour s'amuser avec les copains ».
Et puis, il y a Alexandre qui, sur son vélo, commence à se faire un prénom. « Il a commencé à faire du vélo tout petit, du bi-cross d'abord puis de la route et ça a vite marché », raconte Sylvie, ravie et fière, comme toute maman, de voir la progression de son fils.
Depuis la saison dernière, il a intégré l'équipe de l'armée de terre. Une formation amateur de haut niveau qui a pour vocation de mettre le pied à l'étrier à de jeunes espoirs. « Il vient de resigné un contrat de quatre ans. J'espère qu'il va faire de bonnes places cette saison. L'an dernier, il a découvert, a travaillé pour les autres. Il sait les conditions : on n'a rien sans rien. Il est conscient des efforts, des sacrifices pour y arriver. Il a des capacités, maintenant… il faut qu'il pédale ! »
Cross-country - championnats de france
Les championnats de France de cross-country se dérouleront dimanche 3 mars, sur l'hippodrome berrichon de Lignières (Cher). Le point, deux mois avant la compétition, avec l'organisateur Pascal Préault.
Vous avez bourlingué en été et en automne, dans toute la ligue du Centre, pour présenter la manifestation. Quel accueil avez-vous reçu ?
« Partout l'accueil a été très bon, comme par exemple sur l'Ekiden de Châteauroux. On m'a fait monter sur le podium pour évoquer ce championnat de France. C'est important, afin que nous fassions le plein de spectateurs mais aussi de bénévoles. Vous savez qu'il nous faut cinq cents personnes pour encadrer la manifestation. Nous en sommes à trois cents. Tous les volontaires peuvent se rendre sur notre site, ils seront les bienvenus ! »
Financièrement, se lancer dans une telle organisation est un gros risque ?
« Le budget est de 250.000 €. Nous y serons, pratiquement, dès que la région aura voté son budget. Nous avons inclus dans les recettes 4.000 entrées payantes. Nous espérons faire beaucoup plus. Côté partenariat, nous avons, déjà, réalisé notre chiffre prévisionnel. »
Le gros souci était, aussi, la voie d'accès à l'hippodrome ?
« Cela n'en est plus un. Le conseil général du Cher a tenu ses engagements. La route reliant Lignières à l'hippodrome est achevée. L'assemblée départementale y a consacré 290.000 €. La route est élargie et l'accès n'est plus un problème. Nous allons mettre en place, pour ce jour-là, un plan de circulation. »
Vous allez avoir des têtes d'affiche ?
« Les championnats d'Europe ont propulsé aux avant-postes Hassan Chahdi, Laurane Picoche et Sophie Duarte. Tout le monde va venir à Lignières car, dans la foulée, il y aura les championnats du monde en Pologne (NDLR : dimanche 24 mars à Bydgoszcz). Il faudra donc gagner sa sélection, chez nous. »
Vous aviez prévu un invité d'honneur, la veille des championnats de France, pour une conférence-débat ?
« Oui, il s'agira d'une grande dame, Annette Sergent, deux fois championnes du monde de la discipline (NDLR : en 1987 et en 1989). Le thème de cet après-midi du samedi, sera " Il était une fois le cross-country ". »
Et dans les jours qui viennent ?
« Mardi 15 janvier, le président de la Fédération française d'athlétisme, Bernard Amsalem, nous rend visite. Il n'est pas fréquent de voir un président venir chez nous. La conférence de presse se tiendra aux Bains-Douches, à Lignières. »
agenda
La saison 2013 de cross
Dimanche 13 janvier :
championnats départementaux
à La Ferté-Saint-Cyr (41). Amboise (37)
Dimanche 27 janvier :
championnats régionaux
à Chartres (28).
Dimanche 17 février :
championnats interrégionaux
à Mondoubleau (41).
Dimanche 3 mars :
championnats de France
à Lignières (18).
Dimanche 24 mars :
championnats du monde
à Bydgoszcz (Pologne).